L’E-santé pour une meilleure espérance de vie en bonne santé. Ou comment essayer de réduire les dépenses de santé.

La France se félicite assez régulièrement de la qualité de son système de soins, pour le moment encore assez performant dans le domaine du traitement, (mais attention à la diminution des ressources notamment des hôpitaux qui pourrait nous conduire vers une direction proche de ce que l’on observe actuellement en Grande Bretagne).
Notre « Sécurité sociale » a été vantée par beaucoup dont l’administration Obama, flattant ainsi notre orgueil. Nous nous flattons également d’avoir une des meilleures espérances de vie en Europe.
Mais il me semble que c’est pour passer sous silence notre très médiocre place concernant l’espérance de vie en bonne santé.
Selon le dernier bilan démographique de l’Insee, publié le 16 janvier 2017, l’espérance de vie à la naissance a progressé pour les hommes à 79,5 ans en 2017 (+2,1 points par rapport à 2007). Elle est restée stable pour les femmes par rapport à 2016, à 85,3 ans (+0,9 point par rapport à 2007).
Mais l’espérance de vie en bonne santé, est de 64,1 ans pour les femmes et 62,7 ans pour les hommes. Alors que nous sommes dans les pays de tête pour l’espérance de vie, nous sommes pour l’espérance de vie en bonne santé tout juste dans la moyenne en Europe et loin derrière les pays nordiques : Suède, Norvège, Islande. (Ref 1-4).

Ce dernier indicateur publié par la Drees mesure le nombre d’années qu’une personne peut compter vivre sans souffrir d’incapacité dans les gestes de la vie quotidienne. Cette mesure s’appuie sur les réponses à une question posée dans le cadre d’une enquête européenne (Statistics on income and living conditions) : « êtes-vous limité(e), depuis au moins six mois, à cause d’un problème de santé, dans les activités que les gens font habituellement. »
Nous pourrions alors facilement conclure qu’effectivement notre « système de soins » est performant et nous maintient en vie longtemps. Mais il faudrait alors aussi dans le même temps déplorer un mauvais « système de prévention » qui ne nous évite pas l’entrée dans la maladie et une importante morbibité après 60 ans.

Le propos de ce billet est de montrer comment (nous le pensons ou plutôt l’espérons !) la e-santé va améliorer l’espérance de vie en bonne santé des Français (ce qui semble être l’enjeu principal de l’évolution de la santé). Mais évidemment nous avons en arrière-pensée le désir de voir également diminuer les dépenses de santé.

La part des dépenses de santé dans le PIB a été multipliée par 3,5 en 65 ans : elle est passée de 2,5% en 1950 à 8,9% en 2015 (Ref 5)
Mais quelles sont les causes de l’augmentation de ces dépenses.
Finalement pas, comme cela est claironné à l’envie, par le vieillissement de la population mais essentiellement à cause de facteurs non démographiques :
Pour éteiller nos propos, nous nous sommes appuyés sur les travaux de Marianne Tenand : Vieillissement démographique : la hausse des dépenses de santé est-elle inexorable ? (Voir notre référence principale 6).

Voilà les causes principales :
– Les choix politiques (dépenses publiques, ensemble des dépenses consacrées à la santé)
– Le degré d’assurance pris en charge ou imposé par les pouvoirs publics (via les assurances complémentaires obligatoires),
– La politique industrielle relative aux brevets,
– Les mesures de régulation des autorisations de mise sur le marché
– Le remboursement des médicaments,
– La formation et la rémunération du personnel médical….

L’analyse précise de ces causes par innovationEsante montre qu’il y a un cercle vicieux avec un apparent paradoxe.

En effet, meilleur est le système de santé (et le nôtre est très bon !), meilleure est l’organisation des soins, avec plus de dépistages et de diagnostics précoces, avec plus de nouveaux traitements plus coûteux et aussi mieux diffusés… et plus importantes sont les dépenses !

Avec des effets identiques de l’augmentation des revenus individuels, du recours à l’assurance et de la bonne implication des pouvoirs publiques notamment justement dans la politique de prévention et de dépistage des affections les plus courantes tout cela concoure également à une augmentation des dépenses.

Pourquoi cette situation ?

Parce que nous partons de très bas en ce qui concerne la prévention. Voir Réf 7 (définitions du dépistage et des préventions primaire, secondaire et tertiaire)

Malgré le travail remarquable des associations, nous laissons se développer l’hypertension artériel (HTA), le diabète, l’insuffisance respiratoire chronique, les cancers… Alors qu’un pourcentage important de ces affections pourrait ne jamais apparaître. Il faut ensuite courir après les malades pour assurer les diagnostics, entreprendre les traitements souvent mal adaptés et non suivis…
Nous avons toutefois (par rapport aux autres) une bonne culture de l’organisation des soins, mais nous n’avons qu’une très mauvaise culture de la prévention primaire. Cela est encore aggravé par la pénurie de médecins de soins primaire qui n’ont absolument pas le temps de faire de façon satisfaisante cette prévention tous azimuts.

Seule la prévention primaire permettrait d’améliorer le niveau de santé et à terme … peut-être des économies. Mais compte tenu de notre retard dans les 3 volets de la prévention (Réf 7) nous nous attachons surtout actuellement à améliorer les préventions secondaire et tertiaire, car il y a un intérêt immédiat évident sur la santé, mais comme nous l’avons vu, cela entraîne une augmentation des dépenses dans un premier temps.
La prévention primaire est plus complexe à mettre en œuvre, elle participe à l’éducation du public, mais elle permettra à terme une meilleure santé des Français notamment après 65 ans, et participera alors à réduire (un peu) les dépenses de santé.
Il résulte de la situation présente que si les courbes d’espérance de vie croissent régulièrement, les courbes d’espérance de vie en bonne santé restent plates depuis des années.
Pour compliquer la situation il est démontré que les dépenses de santé augmentent en proportion autant à l’âge de 20 ans qu’à 70 ans, donc ce qui peut peser favorablement sur les dépenses de santé c’est le bon état de santé quel que soit l’âge
Alors mêmes que les facteurs non démographiques auront un impact beaucoup plus fort sur les dépenses de santé que le vieillissement de la population, (que ce dernier s’accompagne ou non d’une augmentation des années passées en mauvaise santé), (Ref 6), le seul levier que nous autres professionnels de la santé pouvons actionner pour diminuer les dépenses est celui d’améliorer la santé de tous les Français quel que soit leur âge (ça tombe bien c’est notre rôle !).
Il faut donc faire évoluer notre « bon système de soins » vers « un bon système de prévention », en continuant à investir dans les préventions secondaire et tertiaire bien sûr, mais surtout en redoublant d’efforts pour promouvoir la prévention primaire.
Or à notre sens la santé connectée avec ses NTIC permet de réaliser ce but.
Ce n’est pas intrinsèquement ces nouvelles technologies qui apportent cette promesse, ce sont les transformations sociales, culturelles et organisationnelles de la société qui accompagnent et favorisent le développement de ces nouvelles technologies (l’Internet santé, l’utilisation des objets connectés, des APP…).
Le rôle moteur est la modification de la place du patient qui de passif dans les années 50 est au cœur du système aujourd’hui, cela étant symbolisé par la loi Kouchner (« Toute personne prend … les décisions concernant sa santé » « le médecin doit respecter la volonté de la personne… »).
C’est un point fondamental : l’individu est en attente d’utiliser les NTIC, ce ne sont pas ces dernières qui crées le besoin. (Réf 8) : Christine Thoër
Cela était particulièrement vrai dans les domaines du sport, du loisir et du bien être qui ont été les premiers domaines ou le public s’est approprié les objets connectés : l’accéléromètre permettant de compter les pas en est pour nous tout le symbole de la e-santé ! Et tout est parti de là…

Alors étudions maintenant l’impact de l’e-santé par rapport aux postes principaux des dépenses de santé, puis nous donnerons des exemples d’applications qui vont jouer un rôle important dans cette nouvelle culture de la prévention.

Quels sont les postes de dépenses les plus importants qui grèvent les comptes de l’assurance maladie, et quelles sont les maladies chroniques qui limitent notre espérance de vie en bonne santé ?
Voilà dans l’ordre décroissant les sources de dépenses (Réf 9-10) :
– Les hospitalisations ponctuelles ;
– La prise en charge de la santé mentale ;
– Les cancers ;
– Les soins courants non spécifiques concernant des pathologies non chroniques qui représente 40% de l’activité des médecins généralistes ;
– Les maladies cardio-neuro-vasculaires, et le traitement du risque cardiovasculaire ;
– Le diabète ;
– Les maladies respiratoires chroniques.

Avec cette énumération de situations aiguës et de pathologies chroniques nous sommes au centre de la double problématique : Coût de la Santé/limitation de l’espérance de vie en bonne santé.
Nous pensons à innovationEsante qu’il n’y a pas dans notre pays de gouvernance suffisante de la prévention même si des actions se coordonnent de plus en plus.
Mettons au premier rang le plan global sur la prévention du gouvernement présenté le 26 Mars 2018 lors d’un comité interministériel par Monsieur le premier ministre Edouard Philippe et Madame la Ministre de la santé Agnès Buzyn. (Ref 11)
Voir en référence 12- 32 d’autres initiatives importantes de prévention, de la CNAMTS de l’HAS, du Ministère des affaires sociales et de la santé, des Associations, et même ne soyons pas rancunier en ce mois de Mai 2018 de la SNCF ! mais il s’agit ici surtout de prévention secondaire et tertiaire.

Nous allons essayer maintenant de vous le démontrer que les NTIC vont apporter une aide considérable à la gestion de bon nombre d’accidents de la vie ou de maladies chroniques.
Nous mettrons l’accent sur les actions de prévention qui doivent permettre la transition entre la culture du soin efficace pour une bonne espérance de vie mais insuffisante pour nous assurer une bonne qualité de vie (après la soixantaine) vers la culture de prévention primaire avec ainsi une meilleure durée de vie en bonne santé.

Voyons poste par poste :

– Les hospitalisations ponctuelles :

Elles sont souvent difficilement évitables ou inévitables, mais l’utilisation des objets connectés et des applications de suivi de patient aideront à une sortie plus rapide du patient et facilite déjà une mutation vers l’Ambulatoire. Le patient bénéficiant d’un e-suivi le connectant 24h/24h avec l’équipe soignante. Le patient maîtrisant seul son suivi à l’aide d’une application mobile simple, ou est aidé par des professionnels à domicile qui réalise des soins avec envoi de données (Photographie, éléments cliniques de surveillance…) vers l’équipe soignante, le médecin référent ou le spécialiste, ou une plateforme…
Je peux témoigner personnellement de l’avantage de ce type de suivi pour les patients opérés de hernies, d’une pathologie proctologique, de pathologies des parties molles nécessitant la prise en charge au long cours d’une plaie chronique par une infirmière (IDE)… Les applications permettent aux patients, aux IDE ,aux aidants… d’adresser des informations utiles au suivi, optimisant la surveillance du patient en dépistant tôt ou en évitant des complications, diminuant ainsi le nombre des consultations post opératoires et donc les déplacements de patients parfois âgés ou à mobilité réduite, évitant également les ré-hospitalisations ou permettant des ré-hospitalisations précoces avant l’aggravation de la situation.
De très nombreuses applications sont utilisées en routine dans le parcours de très nombreux patients opérés ou présentant des pathologies chroniques qui nécessitent parfois des hospitalisations ainsi mieux gérées par l’application, voir les exemples dans le prochain chapitre.

– Le deuxième poste est celui de la Santé mentale (maladies psychiatriques, traitements psychotropes).

De même ici il faut favoriser l’ambulatoire favorisée par le suivi connecté. La téléconsultation en psychiatrie n’en est plus à sa phase expérimentale. Intégrée dans les EHPAD et dans les établissements médico-sociaux, la téléconsultation est un gage d’amélioration dans le diagnostic et le suivi des malades psychiatriques, et une promesse également de réduction de dépenses de santé par la diminution des déplacements. (Réf 33-37)

– Le troisième poste de dépenses concerne la prise en charge des cancers, mais c’est la première cause de mortalité. Nous avons déjà montré (dans nos formations DPC) l’intérêt de la prise en charge de ce type de maladies chroniques par des applications, avec une efficacité démontrée. Voir pour l’exemple, l’application développée par le Dr Fabrice Denis et son équipe, qui a fait l’objet d’une étude de phase III et qui concerne la prise en charge de patients présentant un cancer broncho pulmonaire. (Réf 38). Dans cette application le patient doit répondre chaque semaine sur son smartphone, à 10 questions basiques, (poids, appétit, fatigue, douleur, toux, essoufflement, déprime, fièvre, sang dans les crachats), le suivi est complété en fonction des réponses déclenchant le cas échéant consultation et examens complémentaires qui ne sont donc plus systématiques. L’étude montre une amélioration de la qualité de vie des patients et même un allongement de cette dernière. La diminution du nombre de scanners de contrôle est même spectaculaire. En plus de l’intérêt direct pour la qualité de vie du patient cela devrait permettre de substantielles économies. Pour 2018 un projet pour une application de ce type est prévu pour le suivi de tous les cancers. Voilà qui est très prometteur dans le cadre de la prévention tertiaire.

– Le quatrième poste concerne les soins courants non spécifiques concernant des pathologies non chroniques : 31 millions de patients par an. Cela représente 40% de l’activité des médecins généralistes. Il est possible de trouver là une possibilité de réduction des dépenses grâce à la téléconsultation permettant de régler bon nombre de problème aiguës bénins (comme une épidémie de grippe ou le malade va contaminer les autres patients dans la salle d’attente et le médecin lui-même qui le plus souvent n’est pas vacciné !

En retour le patient recevra une prescription parfois sans grand intérêt, pour une pathologie ne méritant habituellement que le repos un peu d’aspirine ou de paracétamol…. Intérêt dans ce cas de la E-prescription). Pour beaucoup de patients dans ce cadre, intérêt de la téléconsultation (patients à mobilité réduite…) et dont la pathologie bénigne ne nécessite pas un examen physique.

– Les cinquième et sixième poste concernent les maladies cardio-neuro-vasculaires, et le traitement du risque cardiovasculaire : Nul doute ici que la santé connectée permettra grâce à la prévention d’importantes économies à moyen et à long terme, il faut distinguer dans ce contexte :
La prévention primaire : prise de la tension artérielle chez un sujet normo tendu afin de diagnostiquer tôt le problème notamment chez les sujets à risque, la pratique de l’automesure tensionnelle à domicile est une mesure plébiscitée par les cardiologues, c’est pour cela que nous l’avons mise en bonne place dans notre cession DPC à Ehealth World Monaco !
La prévention secondaire : contrôle de la tension artérielle (TA) chez un hypertendu traité (45% des hypertendus traités ont une TA non contrôlée)
La prévention tertiaire : suivi de la TA chez un insuffisant cardiaque porteur d’une cardiopathie hypertensive et risquant une défaillance cardiaque.
Autres progrès connectés parmi tant d’autres les pathologies cardiovasculaires : Les défibrillateurs implantés télésurveillés…

– Le septième poste est celui du diabète : 3 millions de patients en 2015, et 4 millions en 2020 !!,
Même intérêt majeur de :
La prévention primaire : hygiène alimentaire, sport (objets connectés ludiques voir marqués CE)
La prévention secondaire : surveillance connectée de la glycémie (objets connectés CE)
La prévention tertiaire, optimisation connectée de la glycémie, utilisation de dispositifs de type pancréas artificiel connecté.

– Le huitième poste est représenté par les Maladies neurologiques ou dégénératives : 1.2 million de personnes en 2015. Beaucoup de ces patients sont en EHPAD et pourraient bénéficier de la télémédecine pour le dépistage et le suivi, évitant bien des transports de ces personnes souvent à mobilité réduite, les transports par ambulance entre les établissements médicaux sociaux et les services hospitaliers étant par ailleurs très coûteux.

– Le neuvième poste concerne les maladies respiratoires chroniques : 3 millions de personnes en 2015.
De nombreuses études ont montré l’intérêt évident de la télésurveillance d’oxygénothérapie à domicile, de la télésurveillance de l’oxymétrie chez les patients appareillés à domicile pour un Syndrome d’Apnées du Sommeil. Intérêt du suivi de la fonction respiratoire à distance par un télé monitoring de la spirométrie et/ou de l’oxymétrie, la mesure par Spirotel (spiromètre de poche dédié à la télémédecine) et par la transmission des résultats par téléphone à un serveur médical… Cela apporte confort, sécurité, réduction des hospitalisations et de la durée des séjours avec amélioration du pronostic vital…
De façon générale de très nombreuses études et ce depuis déjà quelques années ont démontré l’efficacité clinique de la télésurveillance chez les patients atteints de diabète, d’hypertension et d’asthme, notamment chez ceux dont l’état de santé initial est jugé grave.
La télésurveillance permet une meilleure compréhension de l’état de santé, une meilleure maîtrise des symptômes associés à la maladie et une plus grande observance du régime médicamenteux et une plus grande autonomisation des patients.
La télésurveillance engendre une réduction de la demande en soins de santé, précisément chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque ou de maladie pulmonaire obstructive chronique.
Une étude sur deux (Réf 39) a montré une baisse significative de la consommation de services tels que les visites en urgence et les hospitalisations, alors que l’autre moitié conclut à l’équivalence de la télésurveillance et du suivi à domicile traditionnel sur ce plan. (Réf 40). : Priorité à la télésurveillance des maladies chroniques en France

De façon plus globale il est particulièrement intéressant de montrer les applications connectées qui devraient améliorer la santé grâce à la prévention :
Ces actions sont confortées le plus souvent par les objets connectés et les applications. Il faut se féliciter du travail de l’INSERM qui étudie l’impact des objets connectés dans les démarches de soins (Guy Fagherazzi et ses collègues chercheurs en épidémiologie)
Nous avons choisi des dispositifs au service de la prévention qui illustrent parfaitement ce propos. Un zoom est mis sur certaines initiatives en Afrique ou seule la m-santé pourra être décisive en milieu rurale pour les opérations de dépistage et de diagnostic de bon nombre de pathologies sources d’une très importante morbidité.
Nous avons choisi l’exemple de l’Ophtalmologie qui est souvent un problème de santé publique en Afrique (La cataracte est la première cause de cécité) ou à New-York ou la consultation est trop chère pour bon nombre d’Américains !
Nous pourrions retrouver des applications efficientes dans toutes les spécialités, mais le propos était de montrer que la santé connectée explose grâce aux pionniers qui n’ont pas attendu une gouvernance efficace pour innover.

– Un dispositif particulièrement intéressant permet de réaliser tous les examens ophtalmologiques ordinaires. Il s’agit de l’application PEEK vision (Portable Eye Examination Kit). L’application a été développée en collaboration entre les spécialistes de l’Université de Médecine Tropicale de Londres, et la société Golden Gekko. L’application est utilisée pour le dépistage de masse chez les enfants.
Le projet est de réaliser un dépistage au Kenya dans le district de transe Zoia ou 80 % des 2,5 millions d’habitants présenterait des troubles de la vision pouvant conduire à la cécité s’ils ne sont pas traités. L’application est installée sur un Smartphone. L’écran du Smartphone affiche un « E » dont la taille et l’orientation peut changer. L’examiné doit décrire ce qu’il voit. L’examinateur agite le Smartphone en cas de mauvaise réponse. Les résultats sont immédiatement disponibles, ils sont stockés dans la mémoire du téléphone et peuvent être partagés avec des professionnels, pour une prise en charge médicale ultérieure.
Il a déjà été utilisé auprès de plusieurs dizaines de milliers d’enfants scolarisés, permettant de dépister environ un millier de troubles de la vision et de rediriger les enfants vers l’hôpital du chef-lieu de district. Le teste visuel réalisé grâce au Smartphone est aussi fiable que ceux produit par les méthodes classiques. Le dispositif permet également des examens plus approfondis comme une étude de la rétine. Une connexion à une imprimante permet alors d’obtenir des clichés de haute qualité. Ils peuvent servir à identifier un certain nombre de troubles visuels à moindre coût.
L’ensemble du système reviendrait à près de 50 fois moins cher qu’un équipement traditionnel, qui de toute façon n’est pas disponible chez ces populations rurales. La technologie utilisée par ce système est particulièrement adaptée à l’évolution de la société africaine qui a sauté l’étape du téléphone fixe, et même d’Internet sur ordinateur pour passer directement à l’utilisation d’internet sur le mobile. D’après les promoteurs du système 80 % des déficiences visuelles les plus fréquentes dans les pays du tiers-monde (cataracte, glaucome…) pourraient être dépistées efficacement, permettant un traitement avant la cécité.
Alors loin des hypothétiques gadgets électroniques de demain, voilà la santé connectée bien réelle permettant la prévention et le dépistage ! (Réf 42-46).

– Le deuxième dispositif est la lentille Sensimed Triggerfish. (Réf 47). Elle est approuvée par la Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis, (voilà déjà qui nous rassure !).
Cette lentille est à l’hypertension oculaire ce que l’holter est au monitoring cardiaque. Ce dispositif est déjà utilisé dans plusieurs pays européens ainsi qu’au Japon en Australie et au Canada. Cette lentille doit être posée par un médecin, Elle est portée au maximum pendant 24 heures par le patient, soit en hospitalisation ambulatoire soit à domicile. Elle permet un enregistrement automatique des changements dimensionnels de l’œil. Cette analyse est réalisée par une minuscule puce télémétrique située sur la lentille. Les données sont transmises par une petite antenne souple appliquée près de l’œil et reliée à un enregistreur portable. Le médecin doit installer sur son ordinateur le logiciel Triggerfish. Ainsi peut-être réalisé un monitoring de la tension oculaire beaucoup plus précis que la prise de pression ponctuelle réalisée au cabinet de l’ophtalmologiste.
+ Le troisième dispositif dont je voulais vous parler est le système « smart vision Labs », (Réf48) constitué d’un iPhone, d’un processeur et d’une connexion sans fil. Il permet de faire contrôler sa vue par son opticien. L’examen demande cinq minutes. Il évalue l’acuité visuel, dépiste les troubles visuels les plus fréquents, les troubles de la réfraction : la myopie, la presbytie, l’astigmatisme. Le dispositif peut proposer une correction immédiate. Dans d’autres cas, les données sont envoyées à une plate-forme. Un médecin analyse des résultats et adresse 24 heures après, une prescription de correction par exemple, ou propose une consultation spécialisée pour un bilan plus approfondi. L’intérêt du dispositif est qu’il peut être disponible sans qu’il ne soit nécessaire d’avoir à rencontrer un médecin. Aux États-Unis, l’examen coûte environ 40 $ et permet aux patients une importante économie. Le système ne permet pas une prise de tension oculaire ou une analyse du compartiment postérieur de l’œil. Il ne peut donc pas dépister toutes les pathologies, mais ce système permet d’alerter le patient, et de provoquer la réalisation d’un examen traditionnel au cabinet de l’ophtalmologiste. L’intérêt de ce système peu coûteux est de susciter plus fréquemment qu’aujourd’hui la réalisation d’un examen ophtalmologique, permettant ainsi de dépister plus précocement un certain nombre de pathologies.

– Notre quatrième exemple concerne DeepMind, la machine de Deep Learning de Google au service du dépistage ou de la prévention des maladies oculaires. En 2016, DeepMind a battu le champion du monde de jeu de Go. Mais ici, il ne s’agit plus d’un jeu, l’association entre la machine et le Moorfields Eye Hospital de Londres (Réf49) qui reçoit 600 000 patients par an doit permettre de prévenir l’apparition de troubles visuels, voire la cécité chez de nombreux patients prédisposés. Le patient subi un examen comprenant une photographie de la rétine, un fond de l’œil (rétinographie), ainsi qu’une tomographie en cohérence optique. Un algorithme de machine Learning sera ensuite capable d’analyser ces examens, et de détecter s’il existe un problème urgent. L’intérêt de cette association est de pouvoir interpréter beaucoup plus rapidement les données fournies par les examens morphologiques de l’œil, et de pouvoir plus facilement et précocement détecter les pathologies de type dégénérescence maculaire liée à l’âge, ou encore la rétinopathie diabétique. Le système devrait apprendre à repérer des anomalies encore impossibles à dépister par le médecin même spécialiste. Ce projet est emblématique de l’intérêt d’associer une équipe médicale constituée des meilleurs spécialistes dans leur domaine, avec des spécialistes du Deep Learning qui sont également parmi les meilleurs spécialistes dans leur domaine. Les promoteurs de cette aventure, estiment que ce travail devrait pouvoir aider les professionnels de la santé à faire des diagnostics plus rapides et plus précis, permettant des traitements précoces et d’éviter ainsi bon nombre de troubles visuels et un grand nombre de cécité.
Nous avions déjà souligné cette synergie entre data scientist et médecins, caractéristique de la santé connectée dans notre interview de Jérôme Pésenti, un spécialiste de l’intelligence artificielle, qui a travaillé (avant de rejoindre Facebook) avec des pharmacologistes. (Réf 50).
La santé connectée en ophtalmologie apporte ainsi sa pierre à l’édifice d’une médecine plus humaine, à un moindre coût, en mettant au premier plan la prévention, facteur essentiel pour l’amélioration de la santé publique.
Voilà illustré comment la santé connectée nous apporte de réels espoirs d’une révolution de l’organisation de la santé, grâce à l’initiative du public (empowerment, quantified sef…) qui est à l’initiative de bon nombre de projet (Living Labs des associations…). Cette révolution doit nous permettre de faire décoller les courbes de survie en bonne santé des Femmes et des Hommes de ce pays leur permettant de mieux profiter de la retraite, avec à la clef enfin un réel espoir de réduction des dépenses de santé.

De nombreux points abordés dans ce billet seront développés au cours des rencontres préventions santé organisées par la fondation Ramsay Générale de Santé. Le plateau d’intervenants est prometteur, n’hésitez pas chères/chers lectrices.teurs à nous faire part de vos retours sur cet événement et bien sûr à enrichir ce billet par vos points de vue et retours d’expériences.

Références
Ref 1-4 : Esperance de vie, espérance de vie en bonne santé :

1 https://www.francetvinfo.fr/sante/politique-de-sante/l-esperance-de-vie-en-bonne-sante-reste-stable_2564715.html

2 http://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php/Healthy_life_years_statistics/fr

3 https://www.ouest-france.fr/sante/l-esperance-de-vie-en-bonne-sante-reste-stable-depuis-10-ans-5503237

4 https://www.gouvernement.fr/indicateur-esperance-de-vie
Ref 5 : dépenses de santé
5 https://www.francetvinfo.fr/sante/patient/droits-et-demarches/sante-la-part-des-depenses-dans-le-pib-multipliee-par-trois-en-65-ans_2300973.html
6 : Vieillissement démographique : la hausse des dépenses de santé est-elle inexorable ? Marianne Tenand https://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2014-3-page-74.htm

7 Dépistage et prévention
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS),
Le dépistage consiste à identifier de manière présomptive, à l’aide de tests appliqués de façon systématique et standardisée, les sujets atteints d’une maladie ou d’une anomalie passée jusque-là inaperçue. « Comment évaluer a priori un programme de dépistage » : Méthode d’évaluation des programmes de dépistage utilisée par la Haute Autorité de Santé.
La prévention consiste à éviter l’apparition, le développement ou l’aggravation de maladies ou d’incapacités ;
Sont classiquement distinguées la prévention primaire qui agit en amont de la maladie (ex : vaccination et action sur les facteurs de risque), la prévention secondaire qui agit à un stade précoce de son évolution (dépistages), et la prévention tertiaire qui agit sur les complications et les risques de récidive.
8 transformation de la relation médecin-patient au cours des dernières décennies : méta analyse
Référence papier
Christine Thoër, « Internet : un facteur de transformation de la relation médecin-patient ? », Communiquer, 10 | 2013, 1-24.
Référence électronique
Christine Thoër, « Internet : un facteur de transformation de la relation médecin-patient ? », Communiquer [En ligne], 10 | 2013, mis en ligne le 01 février 2015, consulté le 12 juin 2016. URL : http://communiquer.revues.org/506 ; DOI : 10.4000/communiquer.506
Professeure au département de communication sociale et publique à l’UQAM
Ref 9-10 les sources de dépenses de santé
9 https://www.ameli.fr/medecin/actualites/la-cartographie-des-depenses-de-sante-associees-aux-pathologies-frequentes-et-graves
10 http://drees.solidarites-sante.gouv.fr/etudes-et-statistiques/publications/panoramas-de-la-drees/article/les-depenses-de-sante-en-2016-resultats-des-comptes-de-la-sante-edition-2017
11 Dossier de presse : le plan global sur la prévention du gouvernement présenté le 26 Mars 2018
http://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/180326-dossier_de_presse_priorite_prevention.pdf
Réf 12-32 Opération de prévention :
-La CNAMTS :
12 https://www.ameli.fr/sites/default/files/cpam-paris_livret-promotion-actions-prevention_0.pdf
13 https://www.ameli.fr/medecin/exercice-liberal/memos/depistage-prevention/depistage-cancer-prostate
-La HAS Dépistage et prévention :
14 https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_410178/fr/prevention
15 https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_2773240/fr/depistage-et-prevention-en-france
16 http://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/referenciel_pratiques_diabete.pdf

-Ministère des affaires sociales et de la santé
17 http://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/plan-actions-renov-cancer-sein-2.pdf
-La caisse de Prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF !
18 https://www.cprpsncf.fr/le-depistage
Prevention des cancers :
La ligue contre le cancer
19 https://www.ligue-cancer.net/article/743_prevention-les-mecanismes-d-action
Fondation arc
20 https://goo.gl/i3Fjqm
Prévention des dysthyroïdies :
21 https://www.santemagazine.fr/sante/annuaire-des-associations-de-patients/association-francaise-des-malades-de-la-thyroide-aquitaine-midi-pyrenees-181080
Prévention du diabète :
22 https://www.federationdesdiabetiques.org/federation/actions/semaine-nationale-de-prevention
Prévention des AIT/ AVC
23 http://www.strokebestpractices.ca/wp-content/uploads/2010/10/CSBPR-2014_Stroke-Prevention-Definitions-FR4.pdf
24 http://www.esculape.com/generale/avc_prevention.html

Prévention vasculaire après un infarctus cérébral ou un accident ischémique transitoire

25 https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2014-09/avc_argumentaire.pdf
Prévention et dépistage de l’HTA :
26 http://www.cardio-online.fr/Actualites/Depeches/La-Societe-francaise-d-hypertension-fait-des-propositions-pour-une-strategie-nationale
27 https://www.cardiologie-pratique.com/journal/article/0026769-hta-resistante-prevention-prise-en-charge
Prévention de l’insuffisance rénale
28 https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/maladie-renale-chronique/prevention-depistage
29 https://www.francerein.org/articles/prevention
30 http://solidarites-sante.gouv.fr/soins-et-maladies/maladies/article/maladie-renale-chronique
31 https://www.doctinews.com/index.php/doctinews/dossier/item/2286-pr%C3%A9vention-de-la-maladie-r%C3%A9nale-chronique
Prévention dépistage de l’insuffisance respiratoire chronique
32 http://www.who.int/respiratory/fr/
Télémédecine et e-psychiatrie
33 http://www.ccomssantementalelillefrance.org/sites/ccoms.org/files/pdf/Dimaggio13-06-2017.pdf
34 http://www.psycom.org/Actualites/E-Sante/Telemedecine-Au-centre-hospitalier-du-Rouvray-la-tele-psychiatrie-au-service-de-la-sante-mentale
35 Dr Sadeq HAOUZIR :La télémédecine et la e-psychiatrie : que faut-il en penser ? https://goo.gl/GJpiYz
36 http://www.telemedecine-360.com/category/specialites-medicales/psychiatrie/
37 https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_2670322/fr/experimentations-relatives-a-la-prise-en-charge-par-telemedecine
38 APP de suivi de patients :
Fabrice Denis Randomized Trial Comparing a Web-Mediated Follow-up With Routine Surveillance in Lung Cancer Patients
JNCI: Journal of the National Cancer Institute, Volume 109, Issue 9, 1 September 2017, djx029,
40 ( Antadir.com/telemedecine.pdf ) https://www.antadir.com/uploads/editor/file/inspirer_22_telemedecine.pdf
41: Priorité à la télésurveillance des maladies chroniques en France:

2017 – 2020 : Priorité à la télésurveillance des maladies chroniques


42 Organisation Mondiale de la Santé (OMS) : Cécité et déficience visuelle
43 Amoaonlus : la cécité en Afrique
44 Innogence Pulse : PEEK Vision, l’application de tests visuels pour les pays en développement
45 France 24 : Le Phacokit, la solution low-cost contre la cataracte :
http://www.france24.com/fr/20140509-medecine-afrique-phacokit-solution-low-cost-contre-cataracte-pays-pauvres
46 Marc Soler, Nicolas Bondu : L’ophtalmologie connectée : l’espoir d’un diagnostic plus précoce d’un grand nombre de pathologies oculaires.

L’ophtalmologie connectée : l’espoir d’un diagnostic plus précoce d’un grand nombre de pathologies oculaires.

47 http://www.sensimed.ch/fr/sensimed-triggerfish/sensimed-triggerfish.html
48 https://www.smartvisionlabs.com/
49 https://www.moorfields.nhs.uk/news/moorfields-announces-research-partnership
50 http://innovationesante.fr/lintelligence-artificielle-se-mobilise-contre-la-maladie-dalzheimer-interview-de-jerome-pesenti/

Crédits photo : Thx à @jdmason 

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *