Révolution dans les cabinets : La téléconsultation c’est parti ?

Deux ans après notre billet « La télémédecine : Espoir, définition et réalité. », nous rendions compte de la difficulté de la mise en place de la téléconsultation.  Il y a un an nous insistions sur l’intérêt de  « La télémédecine, et les déserts médicaux ».

L’évolution semble enfin favorable pour une généralisation imminente de la téléconsultation ?

Jusqu’à présent seules quelques plateformes (dont médecin direct) avaient débroussaillé le terrain en s’exposant d’ailleurs à de nombreuses critiques. Les assureurs et en particulier AXA avait fait couler beaucoup d’encre en permettant à ses assurés de bénéficier de la téléconsultation, relire notre billet « Le groupe AXA, l’art de sortir des sentiers battus grâce à la télémédecine ».

Pour notre part nous avions toujours soutenu ces pionniers qui ont forcé le passage vers une démocratisation de la téléconsultation qui semble se concrétiser aujourd’hui.

Mais si les textes semblent permettre la téléconsultation au quotidien des freins techniques subsistent.

Indiquons le cadre réglementaire actuel :

L’avenant n° 6 à la convention nationale, approuvé par un arrêté du 1er août 2018, fixe les tarifs des actes de téléconsultation et en prévoit le cadre de mise en œuvre. Une aide à l’équipement des médecins est également proposée par l’Assurance Maladie pour les médecins libéraux via 2 nouveaux indicateurs dans le volet 2 du forfait structure à compter de 2019 (350 € pour l’équipement de vidéotransmission et 175 € pour l’équipement en appareils médicaux connectés). Par ailleurs, les médecins continueront à être accompagnés par les pouvoirs publics (ARS) dans leurs projets de télémédecine

Le coup d’envoi a été donné officiellement le 15 septembre dernier.

La téléconsultation entre dans le cadre commun, fini les expérimentations limitées avec la nécessité de réaliser de multiples démarches.

Les lettres clefs ont été publiées les tarifs des consultations précisés (Ref 1).

Les majorations sont applicables : N (nuit), F (dimanche et jour férié), MEG (majoration enfant pour médecin généraliste), MCG (majoration de coordination des généralistes), MCS (majoration de coordination des spécialistes), MMG (majoration pour les généralistes).

Tout devrait pouvoir commencer aujourd’hui.

Mais sur le terrain de nombreux logiciels équipant les cabinets médicaux rencontrent des problèmes techniques de toutes sortes comme l’intégration des nouvelles lettres clés par exemple. Avec pour le moment un blocage des Béta tests que certains acteurs du secteur voulaient mettre en œuvre et qui sont repoussés sans donner de date précise de déblocage de la situation. 

C’est mon cas aujourd’hui avec absence de compatibilité de mon dossier patient avec mon prestataire de téléconsultation m’interdisant de réaliser le beta test prévu.

Pourquoi la téléconsultation :

-Aider le patient isolé, éloigné (désert médicaux 8.6% de la population)), peu mobile (âgé), ou dont la nature de la consultation ne nécessite pas son déplacement à rencontrer plus facilement le professionnel de santé

– Améliorer les délais de prise en charge.

-Eviter le recours aux services d’urgence, éviter des hospitalisations.

En résumé, simplifier l’accès aux soins, améliorer la qualité de vie des patients, unifier l’offre de soin sur tout le territoire.

Qu’est ce qui différentie la téléconsultation (TC) par rapport à la consultation classique (CS) au cabinet ?

                  En principe rien en dehors de l’absence de proximité entre le patient et son médecin.

                  Bien sûr la nature de la consultation doit être adaptée à l’absence de nécessité d’un examen physique comportant par exemple une palpation ou une auscultation, ou de regarder un conduit auditif…

 C’est alors le médecin qui au début de l’échange audio vidéo avec son patient décide si la TC est possible, elle peut alors commencer. Dans le cas contraire le médecin invitera le patient à consulter de façon classique.

La TC obéit alors aux mêmes règles que la Cs, l’une des règles de base étant le respect du parcours de soins.

-Dans le cas général, la TC est réalisée par le médecin référent qui connait et a le dossier du patient.  Le médecin doit avoir consulté en présentiel le patient dans les 12 mois avant la TC, il doit y avoir une alternance entre TC et CS. Avec les exceptions habituelles :

-les patients de moins de 16 ans,

-l’accès direct aux spécialités : gynécologie, ophtalmologie, stomatologie, chirurgie orale, chirurgie maxillo-faciale, psychiatrie ou neuropsychiatrie et pédiatrie ;

-les cs en urgence.

-Si le médecin référent est non disponible,

-si le malade n’a pas de médecin traitant.

Comment s’initie la téléconsultation :

La demande est faite par le patient en respectant les règles sus cités.

Comment s’organise la téléconsultation ? Le médecin guide le patient !

– Une communication vidéo est obligatoire : L’assurance maladie précise que « Les outils de communication vidéo existants sur le marché (exemple Skype, FaceTime…) apparaissent suffisamment sécurisés pour l’échange vidéo avec le patient lorsqu’il est connu. Toutefois, ils ne remplissent pas les conditions de sécurité suffisantes pour les échanges de documents médicaux (photos, etc.) qui viendraient en complément de la téléconsultation. De ce fait, ils n’offrent pas aux médecins de solution complète pour tout l’ensemble du processus nécessaire à la réalisation des actes de télémédecine ». Différents opérateurs proposent des solutions mais c’est au médecin de vérifier que les critères de sécurité sont bien respectés pour l’échange de données personnelles de santé.

– Le médecin peut donc communiquer le lien d’un site ou d’une application via un ordinateur, une tablette ou un smartphone, équipé d’une webcam.

– dans certains contextes, une cabine ou un chariot de TC peuvent être utilisés (dans une maison de santé pluriprofessionnelle, un centre de santé, une pharmacie…) avec le cas échéant utilisation d’objets connectés permettant des mesures une auscultation ….

– Le patient peut être aidé par une tierce personne (médecin traitant, IDE, pharmacien…).

– Le médecin est responsable de la qualité de la consultation de la confidentialité et de la sécurité des échanges.

Après la téléconsultation :

-la vérification des droits du patient peut être faite par le médecin via un service en ligne dédié (ADRi), peut être plutôt avant la TC !) 

-le médecin peut adresser une ordonnance au patient sous format électronique sécurisé, via une plateforme sécurisée, ou par la Poste.

-un compte rendu de TC doit être classé dans le dossier du patient détenu par le médecin référent (et de préférence dans son DMP).

– Le patient règle la consultation selon les mêmes critères que pour une CS classique, au même tarif avec une possibilité de dépassement d’honoraires (médecins de secteur 2).

Le paiement de la consultation selon des règles et les obligations habituelles avec les possibilités de tiers payant :

-Chèques, virement bancaire, solution de paiement en ligne proposée par le médecin.

-Télétransmission de l’acte par le médecin.

                  Le médecin téléconsultant dont le logiciel métier est à jour vis-à-vis de l’avenant 18 « télémédecine » au cahier des charges SESAM Vitale transmet une FSE en mode SESAM sans Vitale, en l’absence de carte Vitale du patient. Le médecin téléconsultant dont le logiciel métier n’est pas à jour vis-à-vis de l’avenant 18 « télémédecine » au cahier des charges SESAM Vitale transmet une FSE en mode SESAM dégradé. A titre dérogatoire, le médecin téléconsultant est dispensé de l’envoi de la feuille de soins papier parallèlement au flux télétransmis.

                  En conclusion.

En tant que chirurgien je souhaite intégrer la téléconsultation à mon activité quotidienne au cabinet médical.

                  Elle me permettra essentiellement de simplifier le suivi d’un patient dans le cadre de son parcours de soins :

                  -en évitant à une personne âgée ou dépendante de faire le déplacement alors qu’une visio conférence avec échanges verbales et vue d’une cicatrice seraient suffisants.

                  – de réaliser les contrôles post opératoires systématiques de tous les patients intégrés dans un protocole de suivi basé essentiellement sur l’interrogatoire. (Environ 300 patients par an).

                  -de réaliser des primo consultations à la demande du médecin référent ou des contrôles post consultations ou post opératoires pour des patientes en EHPAD par exemple.

                  Avec l’usage, et si toutes les contraintes techniques sont maitrisées, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, les indications devraient s’étendre.

Chacun en fonction de sa spécialité pourra adapter la TC à sa patientèle.    

Il reste que par expérience je n’ai qu’une confiance limitée dans les opérateurs qui ne maitrisent toujours pas aussi bien qu’ils le promettent l’interopérabilité de leurs solutions, et la disponibilité de leur hot line !! Donc méfiance avant les choix.

Mais le mouvement est en marche, avec le DMP, les transmissions cryptées des documents du cabinet, la e-santé au quotidien commence à ressembler enfin à quelque chose, Et ce n’est que le début.

Ref 1 :

Téléconsultation généraliste (TCG) : téléconsultation effectuée par un médecin généraliste ou spécialiste en médecine générale : tarif TCG à 25 €

Téléconsultation (TC) :

Téléconsultation effectuée par un médecin spécialiste (hors médecin généraliste, psychiatre, neurologue, neuropsychiatre) : tarif TC à 23 €

Téléconsultation effectuée par un psychiatre, neurologue, neuropsychiatre : tarif TC à 39 €

Téléconsultation effectuée par un psychiatre, neurologue, neuropsychiatre : tarif TC à 39 €

2 commentaires Ajoutez les votres
  1. Bonjour, merci pour cet article très intéressant.
    Je me permets de compléter votre propos par notre initiative.
    En effet, Il existe d’autres possibilités que les sociétés commerciales ou la relations médecin traitant – patient exclusive pour effectuer de la télémédecine dans le parcours de soins coordonné.
    Nous sommes une équipe constituée d’une vingtaine de médecins généralistes et d’urgentistes réunis au sein d’une SELAS.
    Nous avons créé un cabinet médical dont l’objet est la téléconsultation dans le parcours de soins coordonné.
    Nous nous présentons comme une plateforme de recours territoriale médicale.
    Au travers de nos projets sur l’ensemble de la France, nous rencontrons progressivement nos collègues médecins et les différentes CPAM afin d’y être référencé et de pouvoir être une aide médicale sur laquelle on peut s’appuyer en cas de non disponibilité du médecin traitant.
    Cette initiative médicale inaugure une nouvelle ère de respect et de collaboration entre collègues au service du patient.
    Je suis à votre disposition pour de plus amples renseignements sur stephane@teledok.fr et nous faisons une
    soirée de rencontre-débat le 06/12 au 7 rue Spontini-75016 Paris sur ce sujet.
    Cordialement,
    l’équipe médicale teledok

    1. Bonsoir Stéphane, merci pour votre commentaire. Comme vous le savez nous sommes attachés Marc et moi à cette idée de remettre le patient au centre des préoccupations. C’est l’un des avantages que nous apporte la technologie dans le domaine de la santé et dans bien d’autres domaines d’ailleurs. L’idée de vous regrouper en pairs inaugure comme vous l’annoncez une ère de respect et de collaboration entre professionnels de santé au service du patient ! De nombreux regroupements de professionnels, universitaires, chercheurs ou encore associations de patients en attestent. Nous ne pourrons pas être présents sur Paris le 6 décembre prochain, au plaisir de recueillir la teneur de vos échanges et des idées qui auront émergées au cours de cette soirée ! A très bientôt. Nicolas

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