La santé connectée et la circulation des compétences à travers les frontières.


France 1 ; États-Unis 0 ; Suisse ?

S’il existe un domaine où la circulation des idées est essentielle, c’est bien celui des sciences. Cela implique également la circulation des personnes qui entreprennent et qui doivent aller là où leur savoir peut faire naitre l’innovation.

Il faut probablement bénéficier des nombreux hasards de la vie pour voir évoluer une Marie Curie en France et tant d’autres « étrangers » à leur pays d’adoption pour le plus grand bénéfice du pays hôte. Encore faut-il que ces hasards ne soient pas trop contrariés par la complexité des lois intervenant sur les flux migratoires.

L’exemple que donnent actuellement les Etats Unis est édifiant.

10 des 23 prix Nobel de médecine décernés aux États unis depuis l’année 2000, l’ont été à des immigrés.

Si 13 % de la population des U.S. est étrangère, 24% des créateurs d’entreprises dans le domaine de ta technique et de l’engineering sont des immigrés.

Dans la Silicon Valley le pourcentage atteint 44%, et ces dirigeants demandent que l’on améliore encore la possibilité d’accueillir les talents étrangers car la croissance de leurs entreprises en dépend.

Actuellement le visa H-1B (Specialty Occupation) est nécessaire si vous souhaitez travailler pour le business et créer une entreprise aux Etats-Unis, avec un diplôme de niveau bachelor à minima (ingénieurs, scientifiques, mathématiciens)

Or ce visa H-1B, n’est toutefois pas spécifiquement conçu pour les étrangers voulant créer une entreprise sur le sol Américain.

Il y a bien d’une part les visas temporaires pouvant dans certains cas être renouvelés indéfiniment, et la fameuse « green card » qui donne un droit de résidence illimité et la possibilité de demander la nationalité Américaine après 5 ans, mais l’obtention dans les deux cas est si compliquée.

Pour hacker ce système d’immigration si complexe et contraignant, certains ont même imaginé installer les talents étrangers sur des bateaux dans les eaux extra territoriales !!

Une autre astuce consiste à faire parrainer les postulants possédant un visa H-1 par les universités, car si le nombre d’employés possédant ce type de visa est plafonné pour les entreprises, il ne l’est pas pour l’université, un contrat de recherche entre un étudiant étranger et une université permettant de contourner l’obstacle.

Pour tenter de remédier à ce problème de recrutement de talents étrangers, des sociétés de service se sont même créées pour aider les start-ups et les petites entreprises Américaines. http://startupimmigrationattorney.com/services/

D’autres initiatives locales émanant des entreprises telles que le Global Entrepreneur-in-Residence Program tentent également de contourner les obstacles.

Malgré ces initiatives, dans la pratique le système d’accueil des talents étrangers aux Etats unis est pratiquement bloqué et ce depuis des années.

Des structures européennes ont aussi été créées pour aider à l’émigration vers les états unis. Julien Barbier a lancé Techmeabroad en mars 2015, Migreat a été créé par trois fondateurs italiens en 2012. Voir également: https://www.maddyness.com/business/2015/07/07/startup-visa-migreat/

Dans ce contexte extrêmement complexe et pénalisant pour l’entreprenariat, l’administration Obama a voulu agir rapidement et par décret compte tenu du caractère sensible et clivant de ce sujet ayant trait à l’immigration.

Ainsi a été conçu le « startup visa » qui devait entrer en vigueur ce 17 Juillet 2017.

Ce plan donnait la possibilité aux étrangers de résider au États-Unis à la condition d’investir au moins 250 000 dollars et d’avoir des partenaires financiers solides.

Dès novembre 2016 évoquant ses 100 premiers jours au pouvoir, Donald Trump avait annoncé qu’il comptait se pencher sur les visas : « Je vais donner la mission au département du travail d’enquêter sur les abus du système de visas qui portent préjudice au travailleur américain ».

Et quelques heures seulement après l’investiture, le chef d’état-major de la Maison-Blanche, Reince Priebus, a adressé un mémo à tous les départements et agences fédérales américaines afin de geler certains dispositifs de l’ère Obama.  Ce « freeze » concerne toutes les mesures de l’administration Obama en cours d’application, dont le “start-up visa”. Si Donald Trump ne parvenait pas à détricoter cette International Entrepreneur Rule d’ici le 17 Juillet, date de sa mise en application, 2 940 entrepreneurs auraient pu en bénéficier chaque année, et si pour certains observateurs, il était très compliqué de modifier ou de retirer une mesure déjà inscrite au registre fédéral la mauvaise nouvelle est finalement tombée avant la date fatidique.

Le Department of Homeland Security annonce en effet que l’entrée en vigueur du Obama “Startup Visa” est officiellement reporté, pour un examen minutieux, le programme pouvant être simplement supprimé !

La confrontation entre Trump et notamment la Silicon Valley est à son comble.

La situation est exactement opposée en France:

Après le French Tech Ticket, véritable concours, voulu par la précédente présidence, et destiné à attirer les talents étrangers à entreprendre en France, et dont bon nombre de lauréats appartiennent au monde de la santé voici le French Tech Visa, un « Passeport Talents ». Il a été créé par la loi 2016-274 de mars 2016 (avec son décret d’application d’octobre 2016).

Le French Tech Visa est une « procédure prioritaire » pour obtenir en accéléré le titre de séjour « Passeport Talents » d’une durée de quatre ans. Il s’adresse aux fondateurs de start-up qui souhaitent s’installer en France, aux travailleurs étrangers qui souhaitent intégrer une Start up Française, et aux investisseurs internationaux.

La mission French Tech, est caractérisée par l’efficacité : un rendez-vous au consulat pouvant être obtenu en une semaine, le candidat devra débourser 400 euros entre Visa et titre de séjour. Le tout, renouvelable. 10 000 contacts seraient déjà intéressés.

La France prenant ainsi à contrepied l’administration Américaine devrait pouvoir attirer les talents convoités par nos Start up notamment de la e-santé.

Dans ce domaine il est utile de remettre en lumière l’exemple suisse.

Jurgi Camblong cofondateur de Sophia Genetics, start up Suisse spécialisée en bio-informatique, déclarait en février 2015 que sur les 20 collaborateurs initiaux de la société, il y avait 14 nationalités, et les spécialistes susceptibles de la rejoindre étaient partout dans le monde, il fallait pouvoir les recruter sans peine.

Au grand dam de ce dirigeant de start up en pleine croissance, cela risquait d’être remis en cause par les projets de l’administration Suisse voulant légiférer dans le sens d’un blocage en terme d’immigration alors que pour les start ups les migrants sont essentiels. Après moult péripéties non encore réglées, les tentatives de réduire l’immigration en suisse (qui sont en contraction avec les règles de libre circulation en Europe), sont encore en discussion, les suisses devraient voter cette automne pour s’exprimer sur ce sujet…

Entre le protectionniste Américain qui croit défendre les intérêts des travailleurs Américains en s’opposant à la liberté d’entreprise, entre l’attentisme Suisse qui hésite entre son intégration relative à l’Europe et également entre un protectionnisme économique, la position de la France semble actuellement radicalement plus favorable. Le programme French Tech Visa devrait satisfaire les chercheurs et les investisseurs étrangers et les Start ups Francaises.

Le monde de la e-santé a besoin par définition de ce type de mondialisation et donc de la libre circulation des idées et des talents, cela est essentiel au développement et à l’intégration des nouvelles technologies et sera bénéfique à la transition numérique de notre société et de notre système de santé.

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